Leçon de botanique éducative
Au tournant du millénaire, les technologies de l’information ont pris de vitesse les sociétés. En découvrant la puissance de ces innovations, des milieux aussi différents que l’espace géopolitique international et « l’espace médiatique » des sociétés occidentales se sont trouvés projetés dans un désordre anxiogène amplifiant toutes les tensions pré-existantes. Les conflits cyber-économiques et guerriers ne sont qu’un exemple parmi tant d’autres; l’occident s’embrase aussi de l’intérieur avec des crises démographiques, des vagues de migrations de masse et une atomisation des individus amenant tous les trois des excès de fièvre populistes. Une crise en cache une autre. D’ailleurs, quand nous parlons d’éducation, l’obsession est sur les ressources ($$$) et le nombre d’élèves par classe plutôt que sur la formation des maîtres, le cursus scolaire des élèves, les méthodes pédagogiques ou la structure du système d’éducation. À défaut de cibler les problèmes fondamentaux de l’école québécoise, nos gouvernements se sont enchaînés comme les mauvaises réformes éducatives; agrandissant d’année en année la dette des inégalités sociales sur le territoire. Pis encore, cette crise éducative en cache plusieurs autres : 1) la mixité sociale en chute libre sur tous les plans entre les classes éducatives supérieures – les élites mondialisées – et le reste de la population, 2) la formation des élites se trouve à nivelé chaque année par le bas dans les murs des universités, et 3) c’est la notion même d’apprentissage qui se trouve déconstruite au point de faire de l’inculture un nouveau savoir.
Mondialisation et mixité sociales
Pendant que les classes éducatives supérieures (20-30% de la population, surtout dans les villes et banlieues cossues) vivent une lente baisse de pouvoir d’achat camouflée par le marché immobilier qui les avantage à court terme et pendant qu’elle peuvent (pouvaient?) voyager partout sur la planète afin de concurrencer des travailleurs locaux par-delà les frontières nationales, les classes modestes, elles, restent plus souvent qu’autrement dans les alentours d’où elles ont grandies. Cette double réalité cache une inégalité dans l’accès aux opportunités économiques et professionnelles. Un exemple de disparité représentatif de la baisse accentuée de la mixité sociale sur tout le territoire québécois. Une baisse de mixité surtout présente dans nos écoles primaires et secondaire, et qui accentue les inégalités sociales. Lorsque j’expose grossièrement ce tableau des inégalités, je rassemble (agrège) trois variables : 1) le niveau éducatif des parents/grands parents qui représente en soi tout le bagage génétique, mais aussi le milieu de vie où l’enfant socialise et joue sans supervision, 2) le lieu de résidence géographique qui exprime le niveau d’accès général aux services, aux ressources et aux différents réseaux permettant de gravir les échelons de la société, et 3) le niveau de mobilité, qui fait en sorte d’ouvrir un champ d’opportunités qui varie de manière non-linéaire; plus je connais de monde et plus je peux voyager loin et plus je peux étendre mon réseau d’affaires, de connaissances et d’amitiés. De ces trois variables ont peut discerner si nous avons un étudiant avec, ou non, de l’avenir. Triste portrait.
Cette réalité de la mixité sociale qui diminue dans le monde concret est reflétée par les « médias de masse » écrits, radios, télévisuels, mais cette « réalité alternative » en cache une autre : l’atomisation des individus marque dans la chair des émotions négatives et persistantes diminuant la cohésion sociale (ressentiment, colère, apathie et cynisme) provoquant un appel d’air envoyant ces individus atomisés vers les réseaux sociaux et les plateformes alternatives. La fièvre populiste trouve en ces lieux une opportunité à faire valoir ses idées, ses critiques et ses cris de désespoir ignorés par toutes ces élites éclairées, urbaines, mondaines et mondialisantes… bien-pensante du bien-commun, unique tentatrice du vrai, du bien, du beau, la seule qui est détentrice du tampon « FAKE NEWS ».
L’université et la pédagogie
De loin, l’université semble tout d’abord avoir entrepris une virage techno-administratif majeur en occident. Comme la bureaucratie engendre naturellement de la bureaucratie dans toute structure institutionnelle – qu’il y ait croissance ou non de la demande du bien ou service, bien souvent – les départements d’universités aussi ont procréés dans tous les sens. De plus près, à travers les méandres des champs lexicaux des « sciences humaines et sociales construites sur un narratif progressiste » et non des théories 1) falsifiables, 2) mesurables, 3) capable de prédictions et 4) réplicables, une foule d’auteurs pseudo-scientifiques ont faits fi des cris de prudence de Sokal et Bricmont pour fonder des départements universitaires ayant pour mission de casser les couilles des hommes blancs hétéro-cissexués en position d’autorité, pendre les capitalistes, construire la transition écologique avec des règles et des plans keynésiens-centralisés-dans-l’état-comme-chez-les-soviétiques et surtout, éduquer les blancs, les hommes, les monogames, les hétéros, à déconstruire leurs biais racistes, sexistes, misogynes, homophobes, transphobes, leur faire reconnaître leurs privilèges et se soumettre à vindicte de la foule des opprimés, en attente du jugement final. Jusqu’à en faire des « hommes » nouveaux.
Comme des rhizomes souterrains, ces éducateurs-intersectionnels se sont propagés dans les départements de sciences humaines et sociales, puis peu à peu, ont gangrenés les méthodes, les cursus, les procédures internes, avec le support des administrations et la pression des étudiants demandant encore plus de construction sociale et de fragilité blanche. Aujourd’hui, même l’ancien prof à l’UQAM Normand Baillargeon ne croit plus à la mission de l’université dans le contexte actuel : la confrontation sur le champs de la bataille des idées, et non via la haine, la censure et le sectarisme. Puis, finalement, ces intersectionnels-éducateurs sont aussi arrivés dans nos écoles primaires et secondaires, complétant le tableau du nouvel eugénisme et de la propagande totalitaire occidental. Le culte intersectionnel nous impose le signalement de vertus systémiques et des rituels de sacrifice de nos identités privilégiées. Obéissez ou vous subirez le courroux des apôtres baizuo.
Condotierre
L’apprentissage de la maîtrise de soi demande un maître qui puisse nous guider. Ce guide propose des connaissances et une méthode, certes, mais c’est loin d’être le plus important dans cette relation. Le maître est aussi, et surtout, un exemple; un modèle. C’est à partir des modèles d’éducateurs que l’enfant se construit car il utilise ses expériences d’élèves dans les milieux non-supervisés et avec ses pairs afin d’en faire des jeux où il s’invente comme personne. Les apôtres intersectionnels souhaitent briser tous ces liens de confiance perçus comme des « éléments de sujétion », mais aussi redéfinir ce qu’on appelle « un individu » en effaçant la biologie, la géographie, le climat, la génétique et toutes les autres variables de l’identité humaine. L’homme nouveau, c’est l’homme sans sexe, mais avec une sexualité, sans définition, mais définit par sa couleur de peau et son statut de victime-de-concepts-avec-une-lettre-majuscule : Patriarcat, Capitalisme, Racisme systémique. Si les éducateurs de mes enfants voyaient mes enfants comme des petits robots en blocs de construction sociale, j’aurais peur de l’exemple qui est donné à mon enfant. Le fait est que ces modèles sont des anti-modèles perpétuant des mensonges et « socialisant » par le lavage de cerveau que : 1) l’enfant serait un être fragile, FAUX!, 2) qu’il faut toujours croire ses émotions, FAUX!, et 3) que le monde serait séparé entre les bons et les méchants, FAUX! En plus d’aller à l’encontre des connaissances en relation d’aide et en psychologie sociale, ces préceptes démontrent une absence totale de culture sur les principes de la sagesse ancienne.
L’apprentissage par modèle peut être terrible quand il s’agit d’un éducateur-intersectionnel, mais quand il s’agit d’un maître, il ne peut qu’être bénéfique, autant dans ses échecs que ses succès. L’apprentissage par imitation est omniprésente dans la nature. Nous connaissons tous la distinction entre des comportements innés et acquis. Ces comportements acquis, ils le sont par imitation; le petit regarde son parent et copie attentivement ses gestes. Les sagesses antiques procèdent de la même manière; imbriquant dans l’apprentissage des connaissances une méthode, des traditions et une pratique.
Mon père a disparu de ma vie lorsque j’avais quatre ans et toute ma vie n’a été qu’une longue recherche de modèles. Sans objectif, sans mission, sans guide pour montre l’exemple, c’est avec un maître que l’on fait affaire et s’il n’y en a pas, c’est la solitude ou l’environnement immédiat (les mauvais exemples) qui gagnera la bataille. Je me compte généralement parmi les chanceux de ma génération car j’ai eu la chance de croiser quelques modèles qui ont faits germer lentement ma curiosité, ma sagacité et mon tempérament inarrêtable. Cette bataille qui a fait rage dès la petite enfance culmine généralement avec le début de l’adolescence. Après cette étape, le chemin est trop souvent déjà tracé d’avance. La chute de mixité sociale, l’hégémonie culturelle intersectionnelles chez les élites éclairées et l’absence de modèles ne font qu’ajouter des barrières. Tout ce qui reste dans ce champs de ruines, c’est prendre exemple sur les rares condotierres capables de charger dans la vie comme une armée qui fonce vers sa victoire. « Un oui, un non, une ligne droite, un but » (Nietzsche).
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