La méthode de l'absurde comme éthique
Dans l'essai "le mythe de Sisyphe", Albert Camus traite de la problématique des suicides: suicide biologique, suicide philosophique, suicide contemplatif, suicide révolté, suicide de ressentiment, etc Il souhaite juger du fait que la vie mérite, ou pas, d'être vécue. Pour se faire, il utilise la méthode de l'absurde, alliant l'évidence et le lyrisme afin de complexifier la question et nous pousser à y répondre par nous même.
Au même titre qu'une œuvre, le suicide se prépare et se termine. Il est intimement lié à l'absurde puisque le créateur du suicide doit vivre l'absurdité avant de se jeter dans le vide du néant. Dès lors, face à l'absurdité subsiste deux réponses à l'idée du suicide: oui ou non. Dans les deux cas, l'absurdité persiste et signe notre existence du haut de son absurdité indélébile.
Comme Camus l'a dit: "Nous prenons l'habitude de vivre avant d'acquérir celle de penser." Il propose donc une méthode absurde pour expliquer le processus de la pensée. C'est envahi de sentiments profonds, face à l'idée d'être portée et de porter le temps, face à l'horreur de la mort et face à l'inhumanité du Réel que l'homme devient l'Homme-absurde; son personnage conceptuel permettant d'exposr sa vision du surhomme nietzschéen. L'homme, confronté à l'absurdité personnifié en lui-même peut choisir de la nier grâce aux religions du corps et de l'esprit ou de faire de cette connaissance une évolution vers la révolte consciente.
L'Homme-absurde, en décidant d'épouser sa révolte consciente, comprend la matrice de ce monde; une perfection de l'imperfection où règne la théorie pratique du chaos. Paradoxe et absurdité en bref. Pour l'homme du commun, le faux dilemme est de juger de la fin en n'acceptant que le déterminisme ou le chaos de l'absurdité sans nuance. Or donc, accepter l'absurdité sans la révolte consciente est aussi une fuite dans le suicide existentiel. Cette nuance est donc rationnelle dans cette quête d'une compréhension du Réel à la manière d'un art ou d'un moyen vers sa fin; la mort. L'homme du commun à soif de conclusions car il garde en lui l'espoir d'asseoir sa domination sur le temps et le néant qui le gruge par l'entropie absurde de la vie. Son espoir reste irrationnel et l'emprisonne dans la foi.
En regardant; en comprenant et en se révoltant face à l'absurdité, c'est la soumission de sa raison à sa volonté de puissance qui est entamée et ce faisant, l'on fixe un prix à sa vie; on voit le Sublime et on se vit liberté. Par cette méthode de l'absurde, camus propose de se créer liberté malgré le chaos du déterminisme.
Cette méthode n'est pas un modèle ni une fin mais un moyen pour arriver à sa fin. Ce n'est donc pas une morale, puisqu'il n'existe aucune morale sauf "celle qui dicte", que les remords sont inutiles et qu'il n'y pas de coupables, seulement des responsables.
Ainsi, c'est via le Don Juan, l'acteur et le conquérant qu'Albert Camus développe par l'exemple imparfait sa méthode de l'absurde. Le Don Juan se sacrifiera au nom de sa révolte inconsciente, le comédien préférera de vivre et de mourir de façon éphémère à chacun de ses lendemains et le conquérant se consumera dans l'absurdité de ses ambitions. Dans tous les cas, les résultats rendent compte d'une réalité accablante: Il y a tant d'espoir tenace dans le coeur humain. Les hommes les plus dépouillés dînassent quelquefois par consentir à l'illusion. Cette approbation dictée par le besoin de paix est le frère intérieur du consentement existentiel. Il y a ainsi des dieux de lumières et des idoles de boue. Mais c'est le chemin moyen qui mène aux visages de l'homme qu'il s'agit de trouver."
En terminant, Camus rend compte d'une éthique artistique qui choisirait de tendre vers la méthode de l'absurde. Ces œuvres d'art seraient tragiques mais fidèles, consciente et révoltée; en un mot Sublime.
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