Carnets de campagne: ne parlons surtout pas de centralisation
Parmi les grands
sujets oubliés du premier tiers de campagne; pendant qu'on se
concentre sur les pseudo-scandales partisans de tel et tel autre
candidats, des scandales impliquant non pas des idées et des projets politiques mais des procès de personnalités publiques mises en
face de leurs petites phrases et déclarations stupides ne répondant pas aux divers filtres du politiquement correct, se trouve
encore une fois étouffée la remise en question et la critique des
réformes politiques de centralisation mises de l'avant depuis plus
de vingt par divers gouvernements successifs.
Cet oubli s'explique par le monopole de la pensée jacobine dans toutes les questions de « gouvernance » partisane et dans la perspective partagée de l'articulation des pouvoirs politique et des leviers institutionnels par les soi-disant représentants du corps électoral. Ce monopole de la pensée s'inscrit dans une histoire qui remonte aux épisodes révolutionnaires français et américains du 18ième siècle et qui aura été par la suite ré-écrite pour des intérêts idéologiques qui s'inscrivent à leur tour dans l'histoire du 19ème siècle jusqu'à aujourd'hui.
Cet oubli s'explique par le monopole de la pensée jacobine dans toutes les questions de « gouvernance » partisane et dans la perspective partagée de l'articulation des pouvoirs politique et des leviers institutionnels par les soi-disant représentants du corps électoral. Ce monopole de la pensée s'inscrit dans une histoire qui remonte aux épisodes révolutionnaires français et américains du 18ième siècle et qui aura été par la suite ré-écrite pour des intérêts idéologiques qui s'inscrivent à leur tour dans l'histoire du 19ème siècle jusqu'à aujourd'hui.
Pour les adeptes de
« l'anarchie positive » proudhonnienne, les socialistes
libertaires et donc de la plupart des sociaux-démocrates de fait et
des populistes comme Michel Onfray : « Le gouvernement
peut être centralisateur, jacobin, transcendantal et tomber du ciel
des idées platoniciennes ou marxistes – c'est tout comme, Hegel
ayant effectué la liaison entre l'auteur de la « République »
et celui du « Capital ». Dans ce cas-là, il a besoin
d'un État policier, d'une soldatesque aux ordres, d'une mythologie
mobilisatrice, d'une religion civique à même d'obtenir
l'agenouillement citoyen, d'un peuple soumis, pour son bien, aux
décisions du chef de l'État, roi de droit divin. » Cette
critique du pouvoir centralisé est pourtant inaudible dans les
supposées démocraties libérales comme la nôtre mais le principe de
réalité nous impose de remettre constamment en question la qualité de
l'articulation du pouvoir au sein de notre démocratie. Il faut
prendre acte de la crise de représentativité politique qui
caractérise nos institutions politiques.
Au Québec, cette
vision se caractérise avant tout par le premier ministre québécois
qui est essentiellement un seigneur de province disposant d'un accès
dans les trois branches de pouvoir du gouvernement: exécutif,
législatif et judiciaire. Il est élu par un système de vote
uninominal à un tour qui, historiquement, se traduit dans une
articulation entre un parti national (les partis libéraux dans
l'ensemble du Canada) et des mouvements politiques révolutionnaires
(souverainistes) ou réformistes (conservateurs, nationalistes ou
néo-démocrates). Avec l'état des institutions québécoises et
l'accroissement des inégalités sociales dans toutes les sphères de
la vie, de par le maintien de ce système archaïque empêchant
d'orienter d'autres idées que celles des partis officiels, de par
les hauts taux d'abstentions ou de « vote utile » ainsi
que par ce cynisme et ce désintérêt omniprésent dans la bouche de
la population, surtout chez les jeunes, il est nécessaire de prendre
acte d'une crise de représentativité politique causé par un
déficit démocratique dans nos institutions.
Comme Michel Onfray
le crie depuis des années en France : « Mais le
gouvernement peut être décentralisateur, girondin, immanent et
monter de la terre des hommes. Dans ce cas-là, il n'a pas besoin
d'un État policier, mais d'un État libertaire qui garantisse les
libertés; il n'a pas besoin d'une soldatesque, mais d'un ordre
discuté dans des Maisons du Peuple, contractuel et synallagmatique;
il n'a pas besoin d'une mythologie, mais d'une règle du jeu décidée
par les joueurs eux-mêmes; il n'a pas besoin d'une religion avec
temple de la Raison et culte de l'Être suprême, mais d'une
philosophie rationnelle populaire, autrement dit débarassée des
oripeaux de la profession qui font passer de vulgaires guenilles pour
de la pourpre; il n'a pas besoin de l'agenouillement, mais de la
station debout, de la verticalité qui distingue les hommes des
autres mammifères; il n'a pas besoin d'obéir à un mâle dominant,
un chef de bande, un loup de meute, mais à sa décision confrontée
à celle d'autrui et sublimée par la délibération permanente. »
L'objectif politique de la Gironde, en terme d'organisation du
pouvoir, était d'éviter que les individus habitants Paris
monopolisent l'action du gouvernement et imposent leurs décisions
aux autres départements. Que Paris pèse le même poids que les
autres départements. Cette histoire a été kidnappée lors de son
écriture. Onfray rappelle que seulement 4% de la population a participé à la convention, sensée représentée l'universalité des Français... les femmes n'ayant même pas le droit de vote!
Tocqueville raconte
dans « L'ancien régime et la révolution » comment
l'État social et centralisé a préludé (et causé) la révolution
française. De même, dans « De la démocratie en Amérique »,
il évoque comment le terme de « révolution » a été
mal compris par les observateurs de la révolution française. Pour
illustrer son sentiment, il met côte-à-côte la révolution française et la
révolution américaine afin de montrer comment la stabilité du
régime américain s'explique par un haut niveau de démocratie
participative, de représentation et de structures de
contre-pouvoirs, et ce dès l'établissement des premières colonies
américaines, et comment l'instabilité qu'a connu la France dès la
Terreur la caractérise jusqu'à une certaine mesure encore de son vivant. Ce que Tocqueville décrit dans l'Ancien régime ou dans
la fondation des premiers traités et gouvernements régionaux de la
Nouvelle-Angleterre, c'est l'établissement en action d'une vision
girondine de la politique.
Malgré les
hagiographes marxistes et communistes, certains penseurs comme Hannah
Arendt ont été capable, au vingtième siècle, de percer le rideau de fer des pensées
totalitaires et idéologiques décrivant les Girondins comme des
« bourgeois contre-révolutionnaires » pour justifier
leur génocide politique. Dans « De la révolution »,
elle reprend presque thème par thème la lecture de Tocqueville pour
mettre en relief le vol de l'histoire de la révolution française
par cette mythologie marxisante dont se faisait le monopole le parti
communiste français et la tonne d'intellectuels à son service.
C'est aussi pourquoi elle porte une attention particulière à tous
les phénomènes politiques de « conseils » émergeant des
communes dans les régions révolutionnaires qui évoque son idéal
girondin du fait politique.
Les quatre partis
politiques québécois pouvant se targuer d'avoir des milliers
d'adhérents et des dizaines de milliers d'électeurs sont des partis
jacobins. Ils souhaitent passer comme « des hommes d'action »,
« populaires », « sérieux », et
« progressistes », pour faire appel à tous les segments
marketing de la population. Ils pensent tous « qu'un ÉTAT
FORT » c'est un État centralisé à Québec et à Montréal.
Leur vision du fait politique donne une proportion trop forte aux
préoccupations de ces deux régions et couvre des réelles problématiques
régionales qui doivent être adressées par les personnes qui y vivent et non les majorités urbaines de Montréal et de la couronne.
Au Québec, être Girondin, ça serait vouloir des forums, des assemblées et des chambres régionales avec des pouvoirs, des contre-pouvoirs et des leviers institutionnels qui ne dépendent pas du pouvoir de Québec. Ça serait aussi s'opposer à toutes les réformes en éducation, en urbanisme, en santé et dans les services sociaux qui centralisent les pouvoirs et sapent les contre-pouvoirs qui étaient en place pour le bénéfice de la population. Ça serait finalement appuyer toute réforme du mode de scrutin qui détruirait le monopole historique des partis et mouvements politiques au Québec afin de redonner une dose de démocratie dans la sphère publique. Mais bon, c'est toujours plus simple de prendre une tweet et parler pendant deux semaines de la personne qui l'a écrit.
Au Québec, être Girondin, ça serait vouloir des forums, des assemblées et des chambres régionales avec des pouvoirs, des contre-pouvoirs et des leviers institutionnels qui ne dépendent pas du pouvoir de Québec. Ça serait aussi s'opposer à toutes les réformes en éducation, en urbanisme, en santé et dans les services sociaux qui centralisent les pouvoirs et sapent les contre-pouvoirs qui étaient en place pour le bénéfice de la population. Ça serait finalement appuyer toute réforme du mode de scrutin qui détruirait le monopole historique des partis et mouvements politiques au Québec afin de redonner une dose de démocratie dans la sphère publique. Mais bon, c'est toujours plus simple de prendre une tweet et parler pendant deux semaines de la personne qui l'a écrit.
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