Je regarde Nicolas
Domenach, libéral, progressiste et mondialiste, et Éric Zemmour,
conservateur, souverainiste et républicain, s'entretenir et débattre
dans leur chronique « On n'est pas forcément d'accord »
sur la radio RTL en France. J'ose faire ça en tant qu'individu qui
se considère de la grande grande tradition socialiste libertaire et
démocrate parce que je considère qu'il est impensable de ne pas
connaître tous les arguments des camps idéologiques adverses dans
leur forme la plus puissante et nuancée possible. Plutôt que de
concentrer mon attention et mon analyse sur des sujets mineurs, des
individus sans envergures, des médiocres et des écoliers, je vais à
fond dans la problématique pour être capable de saisir le plus de
perspectives différentes et éviter les angles morts de la pensée
idéologique.
Cette semaine, le
duo revient après les vacances. Zemmour est très bronzé et
Domenach débute tout de go au sujet de la « surprenante »
démission de Nicolas Hulot. Zemmour décide qu'il tourne autour du
pot et y va de sa perspective radicale: le problème du mouvement
écologiste est qu'il est individualisé par des progressistes et
qu'à la base c'est un mouvement réactionnaire en face de la société
de consommation/industrielle. Domenach est d'accord et j'opine de la
tête en regardant le segment. Ça y est, prenez cette date en note,
les astres sont alignés.
Réactionnaire?
Toute société pose
des hiérarchies de valeurs dans ses structures, institutions,
traditions. Comme la société actuelle est celle des gestionnaires
et de l'économie, toutes ces structures, institutions, traditions;
spécifiques aux États et aux régions, sont alignées directement
sur les valeurs véhiculées par les systèmes économiques
auxquelles elles sont soumises par la gestion : la valeur de
l'argent, de l'efficacité, de la transparence, de la gouvernance, du
profit et de la croissance économique « nécessaire ».
Créer des emplois, créer de la richesse, créer de la valeur.
À l'opposé,
l'écologie est un frein à cette tendance à l'expansion. On nous
dit que cela peut se faire à coût nul ou que c'est un progrès mais
c'est totalement faux. La science l'a dit, modifier les modes de
consommation n'a presqu'aucun impact sur l'état du monde. Tout
objectif écologique entraînera une perte massive dans le
portefeuille des « contribuables »; le sacré-saint
pouvoir d'achat. Qui plus est, comme Alain Deneault le souligne de
douze manières différentes dans « De quoi Total est-elle la
somme? », on peut toujours faire plus d'argent en jouant avec
le droit et c'est précisément ce que font les entités et
corporations globalistes qui ont émergé de la mondialisation
libérale. Nous ne faisons que rentrer dans le sujet en disant que
les intérêts de l'écologie vont directement en contradiction avec
les intérêts de ces quelques 900 grandes corporations mondiales
qui, pour certaines d'entre elles, revendiquent une souveraineté par
leurs emprises sur les territoires et les ressources.
Le vrai sujet
L'actualité nous
rattrape à tous les détours: le pipeline Transmountain est arrêté
par la cour fédérale et la même journée, Trump réussit à faire
remettre en question la « gestion de l'offre » - qui
protège notre marché du marché américain, bourré de
somatotrophine pour stimuler la production de lait chez les vaches.
Dans les deux cas, la mondialisation libérale et totalitaire est en
fonction car l'Alberta ne peut pas vivre au niveau de vie qui est le
siens sans que son pétrole sale, une de ses expertises provinciales
(une vache à lait), aie accès aux marchés mondiaux. De même, sans
la gestion de l'offre ou sans autre mécanisme compensatoire pour les
agriculteurs, notre marché sera inondé de produits américains et
fera effondrer une industrie entière. Quand le sol se meurt, le
reste suit peu après.
Le vrai sujet, ce
sont les impacts de la mondialisation libérale. Les impacts de la
croissance et de la société de consommation globalisée et
américanisée. Les impacts de la concentration des pouvoirs dans les
mains d'entités plus puissantes que des États et ses représentants.
Les impacts d'une crise démocratique au sein même des dernières
démocraties libérales de la planète. Les impacts d'un modèle
économique qui stimule lui-même ses propres crises par
anticipation.
La réponse?
En face de la
mondialisation, les discours nationaux et souverainistes prennent de
l'essor. À gauche et à droite se développent des critiques
incomplètes d'un mouvement civilisationnel qui les englobent. Des
deux perspectives on regarde la poutre dans l'oeil du voisin tout en
étant conscient que quelque chose se prépare et qu'on ne peut pas
avancer seul dans cette guerre de tous contre tous. Le mal est
profond et les solutions sont radicales.
PS :Si vous
croyez encore en la révolution anticapitaliste, s'il vous plaît taisez-vous et laissez les parents parler.
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